Jules Verne

Une nouvelle exploration de la fosse, entreprise par l'ingénieur, pouvait-elle donner la raison d'une si longue absence ? Non, évidemment.

Ainsi, du moins, le pensa Sir W. Elphiston. Après avoir minutieusement inspecté le cottage, il fut très embarrassé sur ce qu'il convenait de faire.

L'obscurité était profonde. L'éclat des lampes, balancées aux mains des agents, étoilait seulement ces impénétrables ténèbres.

Soudain, Jack Ryan poussa un cri.

« Là ! là ! » dit-il.

Et son doigt montrait une assez vive lueur, qui s'agitait dans l'obscur lointain de la galerie.

« Mes amis, courons sur ce feu ! répondit Sir W. Elphiston.

-- Un feu de brawnie ! s'écria Jack Ryan. A quoi bon ? Nous ne l'atteindrons jamais ! »

Le président de Royal Institution et les agents, peu enclins à la crédulité, s'élancèrent dans la direction indiquée par la lueur mouvante. Jack Ryan, prenant bravement son parti, ne resta pas le dernier en route.

Ce fut une longue et fatigante poursuite. Le falot lumineux semblait porté par un être de petite taille, mais singulièrement agile. A chaque instant, cet être disparaissait derrière quelque remblai; puis, on le revoyait au fond d'une galerie transversale. De rapides crochets le mettaient ensuite hors de vue. Il semblait avoir définitivement disparu, et, soudain, la lueur de son falot jetait de nouveau un vif éclat. En somme, on gagnait peu sur lui, et Jack Ryan persistait à croire, non sans raison, qu'on ne l'atteindrait pas.

Pendant une heure de cette inutile poursuite, Sir W. Elphiston et ses compagnons s'enfoncèrent dans la portion sud-ouest de la fosse Dochart. Ils en arrivaient, eux aussi, à se demander s'ils n'avaient pas affaire à quelque follet insaisissable.

A ce moment, cependant, il sembla que la distance commençait à diminuer entre le follet et ceux qui cherchaient à l'atteindre. Était-ce fatigue de l'être quelconque qui fuyait, ou cet être voulait-il attirer Sir W. Elphiston et ses compagnons là où les habitants du cottage avaient peut-être été attirés eux-mêmes ? Il eût été malaisé de résoudre la question.

Toutefois, les agents, voyant s'amoindrir cette distance redoublèrent leurs efforts. La lueur, qui avait toujours brillé à plus de deux cents pas en avant d'eux, se tenait maintenant à moins de cinquante. Cet intervalle diminua encore. Le porteur du falot devint plus visible. Quelquefois, lorsqu'il retournait la tête, on pouvait reconnaître le vague profil d'une figure humaine, et, à moins qu'un lutin n'eût pris cette forme, Jack Ryan était forcé de convenir qu'il ne s'agissait point là d'un être surnaturel.

Et alors, tout en courant plus vite :

« Hardi, camarades ! criait-il. Il se fatigue ! Nous l'atteindrons bientôt, et, s'il parle aussi bien qu'il détale, il pourra nous en dire long ! »

Cependant, la poursuite devenait plus difficile alors. En effet, au milieu des dernières profondeurs de la fosse, d'étroits tunnels s'entrecroisaient comme les allées d'un labyrinthe. Dans ce dédale, le porteur du falot pouvait aisément échapper aux agents.

Il lui suffisait d'éteindre sa lanterne et de se jeter de côté au fond de quelque refuge obscur.

« Et, au fait, pensait Sir W. Elphiston, s'il veut nous échapper, pourquoi ne le fait-il pas ? »

Cet être insaisissable ne l'avait pas fait jusqu'alors; mais, au moment où cette pensée traversait l'esprit de Sir W. Elphiston, la lueur disparut subitement, et les agents, continuant leur poursuite, arrivèrent presque aussitôt devant une étroite ouverture que les roches schisteuses laissaient entre elles, à l'extrémité d'un étroit boyau.

S'y glisser, après avoir ravivé leurs lampes, s'élancer à travers cet orifice qui s'ouvrait devant eux, ce fut pour Sir W. Elphiston, Jack Ryan et leurs compagnons l'affaire d'un instant.

Mais ils n'avaient pas fait cent pas dans une nouvelle galerie, plus large et plus haute, qu'ils s'arrêtaient soudain.

Là, près de la paroi, quatre corps étaient étendus sur le sol, quatre cadavres peut-être !

« James Starr ! dit Sir W.