De 1854 à 1863, apparaissent Joseph Pline, breveté pour plusieurs systèmes aériens, Bréant, Carlingford, Le Bris, Du Temple, Bright, dont les hélices ascensionnelles tournent en sens inverse, Smythies, Panafieu, Crosnier, etc. Enfin, en 1863, grâce aux efforts de Nadar, une Société du Plus lourd que l'air est fondée à Paris. Là les inventeurs font expérimenter des machines dont quelques-unes sont déjà brevetées : de Ponton d'Amécourt et son hélicoptère à vapeur, de la Landelle et son système à combinaisons d'hélices avec plans inclinés et parachutes, de Louvrié et son aéroscaphe, d'Esterno et son oiseau mécanique, de Groof et son appareil à ailes mues par des leviers. L'élan était donné, les inventeurs inventent, les calculateurs calculent tout ce qui doit rendre pratique la locomotion aérienne. Bourcart, Le Bris, Kaufmann, Smyth, Stringfellow, Prigent, Danjard, Pomès et de la Pauze, Moy, Pénaud, Jobert, Hureau de Villeneuve, Achenbach, Garapon, Duchesne, Danduran, Parisel, Dieuaide, Melkisff, Forlanini, Brearey, Tatin, Dandrieux, Edison, les uns avec des ailes ou des hélices, les autres avec des plans inclinés, imaginent, créent, fabriquent, perfectionnent leurs machines volantes qui seront prêtes à fonctionner le jour où un moteur d'une puissance considérable et d'une légèreté excessive leur sera appliqué par quelque inventeur.
Que l'on pardonne cette nomenclature un peu longue. Ne fallait-il pas montrer tous ces degrés de l'échelle de la locomotion aérienne au sommet de laquelle apparaît Robur-le-Conquérant? Sans les tâtonnements, les expériences de ses devanciers, l'ingénieur eût-il pu concevoir un appareil si parfait? Non, certes! Et, s'il n'avait que dédains pour ceux qui s'obstinent encore à chercher la direction des ballons, il tenait en haute estime tous les partisans du « Plus lourd que l'air », Anglais, Américains, Italiens, Autrichiens, Français, - Français surtout, dont les travaux, perfectionnés par lui, l'avaient amené à créer, puis à construire cet engin volateur, l'Albatros, lancé à travers les courants de l'atmosphère.
« Pigeon vole! s'était écrié l'un des plus persistants adeptes de l'aviation.
« On foulera l'air comme on foule la terre! avait répondu un de ses plus acharnés partisans.
- A locomotive, aéromotive! » avait jeté le plus bruyant de tous, qui embouchait les trompettes de la publicité pour réveiller l'Ancien et le Nouveau Monde.
Rien de mieux établi, en effet, par expérience et par calcul, que l'air est un point d'appui très résistant. Une circonférence d'un mètre de diamètre, formant parachute, peut non seulement modérer une descente dans l'air, mais aussi la rendre isochrone. Voilà ce qu'on savait.
On savait également que, quand la vitesse de translation est grande, le travail de pesanteur varie à peu près en raison inverse du carré de cette vitesse et devient presque insignifiant.
On savait encore que plus le poids d'un animal volant augmente, moins augmente proportionnellement la surface ailée nécessaire pour le soutenir, bien que les mouvements qu'il doit faire soient plus lents.
Un appareil d'aviation doit donc être construit de manière à utiliser ces lois naturelles, à imiter l'oiseau, ce type admirable de la locomotion aérienne », a dit le docteur Marey, de l'Institut de France.
En somme, les appareils qui peuvent résoudre ce problème se résument en trois sortes :
10 Les hélicoptères ou spiralifères, qui ne sont que des hélices à axes verticaux;
20 Les orthoptères, engins qui tendent à reproduire le vol naturel des oiseaux;
30 Les aéroplanes, qui ne sont, à vrai dire, que des plans inclinés, comme le cerf-volant, mais remorqués ou poussés par des hélices horizontales.
Chacun de ces systèmes avait eu et a même encore des partisans décidés à ne rien céder sur ce point.
Cependant, Robur, par bien des considérations, avait rejeté les deux premiers.
Que l'orthoptère, l'oiseau mécanique, présente certains avantages, nul doute. Les travaux, les expériences de M. Renaud, en 1884, l'ont prouvé. Mais, ainsi qu'on le lui avait dit, il ne faut pas servilement imiter la nature.