Jules Verne

marié une seconde fois!

--Mon pauvre Van Mitten, répondit le seigneur Kéraban, si ce mariage devient autre chose qu'un rêve, je ne me le pardonnerai jamais!

--Un rêve! ... reprit Van Mitten! Est-ce que cela a l'air d'un rêve! Ah! sans cette dépêche!....»

Et, en parlant ainsi, il tirait de sa poche la dépêche froissée, et il la parcourait machinalement.

--Oui! ... Cette dépêche ... _Madame Van Mitten, depuis cinq semaines, décédée ... à rejoindre...._

--Décédée à rejoindre? ... s'écria Kéraban. Qu'est-ce que cela signifie?» Puis, lui arrachant la dépêche des mains, il lisait:

«Madame Van Mitten, depuis cinq semaines, décidée à rejoindre son mari, est parté pour Constantinople.»

Décidée!... pas décédée!

--Il n'est pas veuf!»

Ces mots s'échappaient de toutes les bouches, pendant que Kéraban s'écriait, non sans raison cette fois:

«Encore une erreur de ce stupide télégraphe!... Il n'en fait jamais d'autres!

--Non! pas veuf! ... pas veuf! ... répétait Van Mitten, et trop heureux de revenir à ma première femme ... par peur de la seconde!»

Quand le seigneur Yanar et la noble Saraboul apprirent ce qui s'était passé, il y eut une explosion terrible. Mais enfin il fallut bien se rendre. Van Mitten était marié, et, le jour même, il retrouvait sa première, son unique femme, qui lui apportait, en guise de réconciliation, un magnifique oignon de _Valentia_.

«Nous aurons mieux, ma soeur, dit Yanar pour consoler l'inconsolable veuve, mieux que....

--Que ce glacon de Hollande! ... répondit la noble Saraboul, et ce ne sera pas difficile!»

Et ils repartirent tous deux pour le Kurdistan, mais il est probable qu'une généreuse indemnité de déplacement, offerte par le riche ami de Van Mitten contribua à leur rendre moins pénible leur retour en ce pays lointain.

Mais enfin, le seigneur Kéraban ne pouvait avoir toujours une corde tendue de Constantinople à Scutari pour passer le Bosphore. Renonça-t-il donc à le jamais traverser?

Non! Pendant quelque temps, il tint bon et ne bougea pas. Mais, un jour, il alla tout simplement offrir au gouvernement de lui racheter ce droit sur les caïques. L'offre fut acceptée. Cela lui coûta gros sans doute, mais il devint plus populaire encore, et les étrangers ne manquent jamais de rendre maintenant visite à Kéraban-le-Têtu, comme à l'une des plus étonnantes curiosités de la capitale de l'Empire Ottoman.

FIN DE LA DEUXIÈME PARTIE

TABLE DES MATIÈRES

* * * * *

DEUXIÈME PARTIE

I.--Dans lequel on retrouve le seigneur Kéraban, furieux d'avoir vojagé en chemin de fer.

II.--Dans lequel Van Mitten se décide à céder aux obsessions de Bruno et ce qui s'en suit.

III.--Dans lequel Bruno joue à son camarade Nizib un tour que le lecteur voudra bien lui pardonner.

IV.--Dans lequel tout se passe au milieu des éclats de la foudre et de la fulguration des éclairs.

V.--De quoi l'on cause et ce que l'on voit sur la route d'Atina à Trébizonde.

VI.--Où il est question de nouveaux personnages que le seigneur Kéraban va rencontrer au caravansérail de Rissar.

VII.--Dans lequel le juge de Trébizonde procède à son enquête d'une façon assez ingénieuse.

VIII.--Qui finit d'une manière très inattendue, surtout pour l'ami Van Mitten.

IX.--Dans lequel Van Mitten, en se fiançant à la noble Saraboul, a l'honneur de devenir beau-frère du seigneur Yanar.

X.--Pendant lequel les héros de cette histoire ne perdent ni un jour ni une heure.

XI.--Dans lequel le seigneur Kéraban se ranga à l'avis du guide, un peu contre l'opinion de son neveu Ahmet.

XII.--Dans lequel il est rapporta quelques propos échangés entre la noble Saraboul et son nouveau fiancé.

XIII.--Dans lequel, après avoir tenu tête à son âne, le seigneur Kéraban tient tête à son plus mortel ennemi XIV.--Dans lequel Van Mitten essaie de faire comprendre la situation à la noble Saraboul.

XV.--Où l'on verra le seigneur Kéraban plus têtu encore qu'il ne l'a jamais été.

XVI.--Où il est démontré une fois de plus qu'il n'y a rien de tel que ontré une fois de plus qersonnages que le seigneur Kéraban va rencontrer au caravansérail de Rissar.